Qwant et Microsoft ont dernièrement annoncé un accord sur l'utilisation par le moteur de recherche français des infrastructures du géant de Redmond et certains s'en sont étonné. Pourtant, ce partenariat semble finalement assez logique lorsqu'on se penche sur l'histoire de Qwant...

La société Microsoft et le moteur de recherche Qwant ont annoncé il y a quelques jours dans un communiqué commun un accord sur l'utilisation par Qwant de l'infrastructure Cloud Azure de Microsoft pour gérer son outil de recherche. Le communiqué explique également un renforcement du rapprochement de Qwant et de Microsoft pour de futurs projets du moteur de recherche français, tels que le développement d’une « plateforme de confiance » open source de gestion des contenus et des droits d’auteurs sur Internet permettant de répondre aux objectifs de la directive européenne sur les droits d’auteurs.

A cette occasion, de nombreuses voix se sont élevées pour arguer du fait que Qwant diabolisant depuis ses débuts son concurrent Google, il était étonnant qu'il tombe ainsi dans les filets d'un autre ogre américain, Microsoft en l'occurrence. Il est vrai que la démarche peut paraître surprenante à première vue. Mais cela n'est étonnant que sur le concept, car il ne s'agit là finalement que d'un accord sur les "tuyaux", l'infrastructure du moteur, pas sur les données qui transitent dessus, même si on peut se poser des questions sur la disponibilité immédiate de ces informations pour le géant américain. Ceci dit, certains se sont demandé pourquoi diaboliser un ogre américain d'un côté et de signer un accord avec son principal concurrent, tout aussi américain, de l'autre côté.

Pourtant, s'étonner de cette situation montrerait une vraie méconnaissance de l'histoire de Qwant, puisque ce moteur a toujours été dépendant de l'entreprise de Redmond, et ce depuis ses débuts. Que ce soit sur ses technologies d'indexation, de crawl et de rendu des résultats web (dépendance plus ou moins forte selon les sources et la période, Qwant n'ayant jamais publié de chiffres précis à ce sujet), sur le moteur d'images (dont il était encore dépendant à 100% il y a peu, alors que la situation va prochainement basculer à l'opposé), sur la publicité, etc., Bing a toujours été présent dans les entrailles de Qwant, et la dépendance du moteur français à Microsoft a toujours été une réalité. Il n'y a donc pas lieu de s'étonner d'un accord entre ces deux parties sur des infrastructures techniques, qui n'est en fait qu'une continuité de ce qui se passe depuis la naissance du bébé 🙂

Maintenant, il est de plus en plus clair que l'objectif de Qwant est de "tuer le père" et d'être de plus en plus autonome techniquement sur les technologies "moteurs" de crawl, d'index, d'algorithmie, etc. Mais, pour cela, la société avait réellement besoin d'une infrastructure plus solide que celle dont elle jouissait jusqu'à maintenant. D'où l'accord signé la semaine dernière qui renforce certes la dépendance de Qwant envers Microsoft à court terme, mais dans une optique de l'atténuer par la suite.

Et le véritable échec, finalement et s'il y en a un, de cette décision, est que nulle part en Europe, Qwant n'ait trouvé une infrastructure assez solide pour satisfaire le cahier des charges du moteur. OVH, notamment, auquel tout le monde pensait au départ, ayant été trouvé trop léger pour cela. Cela montre finalement toute la dépendance qu'un acteur français et européen a en 2019 par rapport aux GAFA, voire GAFAM (en ajoutant Microsoft à l'acronyme). Une situation et un constat qui semblent clair et qui montre bien à quel point l'Europe a raté un train à un moment donné…

Photo du datacenter de Qwant. Source : France 24