Dans notre premier billet consacré à l'attribut nofollow, il a été question de la genèse de cet attribut et de la raison pour laquelle il a été créé.

On entend d'ailleurs souvent parler, à tort, de la "balise nofollow" pour les liens comme de la "balise alt" pour les images. Il n'en est rien. "Nofollow" et "alt" sont des attributs utilisés dans des balises, respectivement A pour les liens et IMG pour les images. Il fallait que cela fut dit...

Bref, l'attribut "nofollow" a longtemps été utilisé sans problèmes, comme nous le disions dans notre précédent billet, jusqu'à ce que certains webmasters le prennent en compte pour "sculpter leur PageRank" et que Google change la façon dont il analyse cet attribut...

La sculpture de PageRank

Pour expliquer le concept de "sculpture de PageRank", il faut rappeler que l'un des critères essentiels (quoi qu'on lise à ce sujet ici ou là) de l'algorithme de pertinence de Google est le PageRank (PR) ou "popularité", ou analyse des liens entrants (backlinks) d'une page : plus une page obtient de liens depuis des pages elles-même populaires, plus elle voit sa popularité (PageRank) augmenter. Le concept est, somme toute très simple (plus il y a de personnes populaires qui votent pour vous, et plus vous êtes vous-même populaire) et Google en donne une image simpliste dans sa barre d'outils grâce au TBPR (Toolbar PageRank) qui propose une note allant de 0 (pas populaire) à 10 (très populaire) pour chaque page du Web.

Le TBPR est donc une vision approximative (mise à jour tous les 3 mois environ) du PR qui, lui, est mis continuellement par Google mais dont on n'a aucune vision précise. Mais ce TBPR a servi à de nombreux webmasters pour "sculpter le PR" de leurs pages Web.

Une taille de bouteille de jus de liens différente selon le TBPR

Premier concept : on estime qu'une page web diffuse, lorsqu'elle créée un lien vers une autre page, une certaine "puissance" à cette page distante. On appelle cela le "jus de lien" (link juice en anglais). Une page A qui pointe vers une page B lui transmet donc une certaine dose de "jus de lien" qui va augmenter le PR de B.

Deuxième concept : plus le TBPR de la page A est fort, plus le "potentiel de distribution de jus de lien" est important. En gros, une page qui a un TBPR de 1 ou 2 disposera d'une mignonnette de jus de lien, une page qui a un TBPR de 7 aura une bouteille d'un litre, un TBPR de 8 correspondra à un magnum, alors qu'au-delà, la page disposera d'un nabuchodonosor ou plus ! L'idéal étant le TBPR de 10 (réservé à certaines pages d'accueil de gros sites américains : Google, Microsoft, IBM, Adobe...) qui correspond à une belle citerne de jus de lien, nirvana ultime du référencement !

Troisième concept : la capacité en jus de lien d'une page est répartie équitablement vers toutes les pages qui reçoivent un lien de cette page. En clair, si la page A a un TBPR de 7 (une bouteille d'un litre de jus de lien, donc) et qu'elle contient 10 liens sortants (internes ou externes) vers des pages distantes, chacune de celles-ci var recevoir 1/10ème de la bouteille, soit 10 cl. Si A créée 20 liens, chaque page héritant d'un lien disposera d'1/20ème de la bouteille, soit 5 cl. Donc, plus une page créée de liens, plus elle répartit le jus de liens qu'elle transmet. Si une page d'accueil de TBPR 3 ou 4 contient 200 liens sortants, chaque page ne va donc recevoir que quelques gouttes de jus de lien et ce transfert sera quasi inefficace.

Le but de la sculpture de PageRank est donc de "supprimer", pour les moteurs de recherche (mais pas pour les internautes) certains liens allant vers des pages à qui on ne veut pas transmettre de popularité. Exemple : des pages comme "Présentation", "Qui sommes-nous ?", "Aide", "Contact", "Conditions générales de ventes", etc. Ou alors les liens externes si vous ne voulez pas transmettre du "jus de lien" à d'autres sites. Etc.

Et pour effectuer cette "sculpture", le système adopté a été de mettre les liens en question en "nofollow" et de garder en "dofollow" (lien normal) les liens vers les pages à qui vous désirez transmettre de la popularité.

Exemple avec une page A qui dispose d'une bouteille d'un litre de jus de lien (TBPR 7) :

- La page A dispose de 20 liens sortants. Si les 20 liens sont en "dofollow", chaque page distante reçoit 1/20ème de la popularité de A. Soit 5 cl.

- La page A dispose de 10 liens vers des pages à qui on veut transmettre de la popularité (pages importantes pour le référencement) et 10 pages à qui on ne veut pas transmettre de popularité. On va donc mettre en "nofollow" les liens vers les pages peu importantes et garder en "dofollow" les liens vers les pages prioritaires.

- Résultat : les pages qui disposent d'un backlink en "dofollow" reçoivent 1/10ème de la popularité de A, soit 10 cl de jus de lien. Leur capital de popularité a doublé. En revanche, les pages qui disposent d'un backlink en "nofollow" voit leur envoi de jus de lien réduit à zéro. Un système de vases communicant a donc mis en valeur les pages à qui on voulait transmettre la popularité de A. CQFD !

Google change la donne

Ce système de "sculpture de PageRank" a donc fonctionné pendant longtemps et les liens en "nofollow" ont fleuri sur de nombreuses pages pendant des mois et des mois. Jusqu'à ce que Google analyse ces agissements et décide changer la donne, estimant que ce type d'action induisait ses algorithmes en erreur.

Depuis 2009, donc, Google a changé la façon dont il analyse l'attribut "nofollow". Ainsi, si on reprend notre exemple précédent, si une page A dispose de 10 liens en "nofollow" et de 10 liens en "dofollow", les pages importantes - disposant de backlinks en "dofollow" - ne reçoivent plus que 1/20ème de la bouteille de jus de lien de A. En gros, l'attribut "nofollow" n'est plus pris en compte par Google pour calculer la distribution de jus de lien d'une page. Tous les liens comptent à nouveau, quel que soit leur statut ("nofollow" ou "dofollow").

La différence est que les pages qui disposent de backlinks en "nofollow", elles, ne reçoivent toujours rien... Vous l'avez compris, dans ce cas, la moitié de la bouteille de A part au caniveau... 10 pages reçoivent 5 cl, soit 50 cl, mais les 10 autres pages reçoivent 0 fois 5 cl, soit... zéro cl... Et hop, une demi-bouteille de jus de lien directement envoyée dans la nappe phréatique du Web...

L'attribut "nofollow" ne sert donc plus, aujourd'hui, à la "sculpture de PageRank", ce qui ne veut pas dire que ce concept a disparu (certains "cachent" les liens grâce à du JavaScript, dans des iframes, etc. pour ne pas que les moteurs les voient ou suppriment encore plus radicalement certains liens de leurs pages), mais cela signifie qu'on ne sculpte plus aujourd'hui avec cet attribut, puisque la loi du Dieu Google a changé... Mais il est certain que certaines tendances actuelles, comme les footers regorgeant de liens de type "plan de site" sont clairement contre-productives en termes de référencement...

Le "nofollow" ne servant plus à sculpter le PageRank, il a alors été utilisé dans les "blocs de liens" pour montrer aux moteurs quel était celui qu'il devait prendre en compte. Mais cela fera l'objet du troisième billet de notre "saga nofollow" 🙂