Une étude récente montre que pour 41% des requêtes, Google montre une réponse directe (Onebox, Direct Answers) dans ses SERP. Un phénomène de « moteur de réponse » qui n'est pas récent mais qui assombrit peut-être chaque jour un peu plus l'avenir du SEO, avec comme première cause le spam incessant auquel est soumis le moteur de recherche...

Le site The Markup vient de publier une étude qui analyse les SERP (pages de résultats) Google avec cette conclusion étonnante (quoi que…) : "41% de l'espace de la première page des résultats de recherche Google sur mobile est occupé par les produits Google." Sur un échantillon de 15% de ces requêtes, ce chiffre monte même jusqu'à 63% ! Et pour 20% des requêtes, aucun "lien bleu" (SEO) n'apparaît dans la page de résultats "au-dessus de la ligne de flottaison" (sans scroller donc).

Avant les "liens bleus", on peut donc voir s'afficher des définitions, le Knowledge Graph (ou Knowledge Panel), des encadrés "PAA" (People Also Ask), un encadré d'informations directement fournies par Google (Direct Answers, Onebox), etc.

L'étude (dont l'explication de l'analyse est disponible ici) porte sur 15 000 requêtes diverses.

Un exemple type est présenté sur la requête [linux] avec ci-dessous à gauche la SERP en 2000 et à droite en 2020 : d'un côté on voit près de 9 "liens bleus", de l'autre plus aucun mais des encadrés d'information, de l'actualité, etc. Flagrant ! :

SERP Google pour la requête [linux] entre 2000 et 2020. Source : The Markup

Google se défend de ce fait par la voix de la porte-parole Lara Levin : "Fournir des liens d'information, aider les gens à reformuler des requêtes ou à explorer des sujets, et présenter des faits d'actualité n'est pas conçu pour privilégier Google. Ces fonctionnalités sont fondamentalement dans l'intérêt des utilisateurs, que nous validons par un processus de test rigoureux", a-t-elle déclaré, en poursuivant : "Parfois, l'information la plus utile sera un lien vers un autre site web ; d'autres fois, ce sera une carte, une liste de restaurants, une vidéo ou une image"." tout en critiquant l'étude de The Markup, estimant que l'échantillon de requêtes utilisé n'était pas représentatif de ce que traitait le moteur de recherche habituellement.

Google moteur de réponse, une situation évidente depuis bien longtemps

Attention cependant : cette étude est présentée sur certains sites comme le fait que "41% des SERP proposent des « produits » Google " (c'est d'ailleurs ainsi que l'étude est présentée par The Markup). Par "produits", il faut bien entendre "produits de l'ingénierie Google" et non pas "produits à vendre" comme des téléphones ou des enceintes connectées. On parle donc bien ici de contenus et explications renvoyés basés sur des algorithmes conçus par les équipes de développement de Google. Nuance. Ceci dit, ici s'agit ici de la notion de "moteur de réponse" que les lecteurs d'Abondance connaissent bien.

Ce phénomène est loin d'être une nouveauté, et on peut même dire qu'il s'agit là d'un des objectifs de Google depuis sa création : se "débarrasser" le plus possible des liens naturels (ces fameux "liens bleus") qu'il ne maîtrise qu'à moitié, pour laisser la place à un système encyclopédique qui répondrait de lui-même aux intentions de recherche de ses visiteurs. Avec le risque (énorme !) que cette réponse soit parcellaire ou, pire, fausse… Ou, pourquoi pas, dirigée. Et les SERP sans liens bleus, initialisées en 2018, vont également dans ce sens.

Finalement, le rêve de Google (recréer le Communicator, l'ordinateur de Star Trek, comme voulu à l'époque par Amit Singhal) serait de n'utiliser les "liens bleus" que dans des cas extrêmes et marginaux, lorsqu'il n'a pas la "certitude" de pouvoir répondre de façon suffisamment juste à la requête tapée (ou la question vocalisée). rappelons que 15% des requêtes traitées par Google dans une journée n'ont jamais été tapées auparavant et sont donc totalement neuves, sans historique ni référence pour le moteur.

Et le SEO dans tout ça ?

Bien évidemment, cette étude nous rappelle que le SEO reste une discipline fragile, car moins il y aura de liens naturels visibles, plus le métier aura des difficultés à survivre. Le risque, ou la perspective, est bien que le SEO devienne un travail de Longue Traîne, voire de Très Longue Traîne, se focalisant sur les requêtes très peu demandées, celles sur lesquelles Google est "obligé" de fournir des liens bleus pour répondre à la question car il n' a pas la capacité à faire autrement. Car pour la Courte Traîne (les "top requêtes" très demandées et très concurrentielles), il y a fort à parier que l'horizon s'obscurcisse fortement, et ce très très rapidement (c'est déjà grandement le cas). L'étude récente de Sistrix sur le calcul du taux de clics dans les SERP est là pour nous dire à quel point la situation est devenue complexe au fil des ans à ce niveau.

Il faut aussi se mettre à la place de Google qui doit chaque jour traiter 25 milliards de pages de spam nouvellement créées. Pourquoi irait-il s'embêter à dépenser des ressources dans ce type d'action de lutte contre le magma de bouse infâme que certains lui envoient, alors qu'il peut orienter ses milliards de dollars vers de l'ingénierie permettant de traiter différemment les data pour proposer une réponse directe ? N'est-ce pas logique, après tout ?

On peut se dire que si le SEO meurt un jour (rassurez-vous, ce n'est pas encore pour aujourd'hui, mais il serait fou et illusoire de ne pas l'envisager pour autant…), ce sera certainement autant à cause des progrès qu'aura effectué le moteur dans l'analyse et le rendu des réponses directes, que par l'immensité du spam qui attaque chaque jour les algorithmes de Google et qui pousse la firme de Mountain View à aller d'autant plus vite dans sa logique de "moteur de réponse". Un cercle vicieux sans fin, hélas. Et dont les spammeurs se fichent bien, il faut bien le dire...